Haniel soupira sur son dossier une énième fois, le lisant d’un œil distrait avant de le refermer, ne tenant pas en place. Il avait horreur d’être enfermé dans un bureau trop longtemps surtout ces temps-ci. Non pas qu’il y ait quelque chose de spécial mais l’Archange se sentait sur les nerfs. L’accumulation de siècles de mensonges et de frustration commençait à se faire sentir et une nouvelle tâche grise s’était logée dans ses plumes : une découverte que l’ange se serait bien passé de faire ce matin. Un avertissement. Si il restait dans cet état il en paierait le prix, lentement mais surement jusqu’à ce qu’il soit trop « gris » pour être crédible dans son rôle. Fort heureusement, il y avait encore de la marge et Haniel n’était pas un être mauvais. Juste trop dur envers lui-même.

Ce jour-là, une nouvelle étrange avait fait son bout de chemin jusqu’à son bureau : un ange gardien ne donnait plus signe de vie. Même s'il n'était pas très apprécié de ses pairs, certains avaient remarquer sa disparition. Haniel aussi d'ailleurs, il ne connaissait que peu le dénommé Zelus mais il savait qu'il s'agissait d'un ange atypique aussi bien à cause de ses yeux que dans son comportement. De fait, l'Archange n'avait rien contre lui - au contraire les anges étranges l’intéressait. Mener une enquête serait une idée mais Haniel ne savait pas à qui confier cela. Il savait que Rafiel avait été envoyé sur Terre pour enquêter sur un autre sujet, et ne pouvait donc pas se tourner vers lui. En fait comme la situation était inconnue, il irait sans doute lui-même - vu qu'il était peut être le seul à s'inquiéter vraiment de son sort. Peut-être que cet ange avait fait une bêtise ou avait besoin d'aide ? Haniel songea que ce serait le mieux placé pour y aller même si normalement il ne s'occupait pas des anges gardiens.

Sinon en pensant à Rafiel… Qu’est ce qu’il devenait sur Terre ? Haniel avait hâte de le revoir. Même s’il ne lui disait pas tout, l’Archange appréciait son disciple qu’il considérait comme la personne la plus proche de lui et s’ennuyait sans le voir… Même si ce souci de vénération lui pesait… L’Archange s’installa plus confortablement sur sa chaise et posa ses pieds bottés sur son bureau. De toute façon personne n’était là pour le voir. Malheureusement.

Des coups sur la porte. Ah, voilà de la visite !

«  Ô Haniel êtes-vous là ? C'est Rafiel. J'aurai besoin de vous parler.  »

Et Rafiel en plus ! Il bondit de son séant pour aller lui ouvrir la porte, trop heureux d’avoir la compagnie de son disciple.

       -  Ah, Rafiel, entre donc !

Il l’accueilli même avec un sourire léger aux lèvres et les yeux bleus pétillants. Haniel s’écarta pour le laisser passer pour demander :

       - Comment vas-tu ? Tu n’as pas de soucis j’espère ?

Après tout, Rafiel avait dit qu’il avait « besoin » de lui parler, il espérait donc que ce ne soit pas en rapport avec d’éventuels ennuis. Haniel referma la porte et l’invita sur la chaise en face de lui. Un sobre bureau en bois sombre fonctionnel sans fioritures, qui correspondait plutôt bien à son propriétaire. L’Archange s’appuya quand à lui sur sa table d’un air détendu, attendant voir ce qui amenait son cher disciple.

Haniel attendit que son disciple soit installé et lui explique donc les raisons de sa venue.

«  Ne vous en faites pas tout va bien, et vous, vous vous portez bien ? Je suis content de vous voir, vous me manquez déjà, Ô Haniel.  »

L’Archange hocha la tête à cette phrase qui reflétait parfaitement son état d’esprit.

- Je vais bien, et tu me manquais aussi.

Le savoir loin l’inquiétait, il ne pouvait s’empêcher de se demander si son disciple allait bien, si il n’avait pas de problème mais Haniel savait qu’il devait le laisser respirer et que son travail ne lui permettait de toute façon pas d’être avec lui tous les jours surtout sur Terre. En règle général il n’aimait pas le savoir loin. L’Archange était rassuré d’entendre tout de même qu’il n’avait pas de soucis, le regardant vite fait serrer sa croix. Un objet qu’Haniel avait toujours eu du mal à comprendre et qui le rendait confus quand il essayait de réfléchir à la question. Néanmoins, aujourd’hui il était content de revoir Rafiel alors il chassa toute pensée à ce sujet de sa tête. Il attendit la suite patiemment.

« Si je suis revenu aussi rapidement à Parëis c'est pour vous demander.. Une faveur… enfin… je ne sais pas si l'on peut réellement appeler cela une faveur, dans tous les cas, ma mission sur terre m'a fait rencontrer une jeune femme…[…] »

Quoi ?

L’esprit d’Haniel butta sur ces mots. La suite éclaircirait peut être le propos.

« […] Elle s'appelle Joah Andersen. Elle est du genre à être souvent mêler à des choses qui pourraient être dangereuses pour elle… Je m'inquiète un peu pour elle à vrai dire et j'aimerai…. J'aimerai pouvoir accomplir le travail d'un ange gardien à ses côtés si vous m'en donnez la permission.  »

Son sourire vacilla un instant et ses yeux bleus s’assombrir quelques secondes tandis qu’il luttait pour ne pas se laisser déstabiliser par une forte émotion dont il avait rarement expérimenté les affres : la jalousie. Ce n’était pas une petite jalousie bénigne qui disparaîtrait aussi vite qu’elle était venue, non, mais bien une jalousie violente, extrême, Rafiel était à lui et il ne laisserait personne le lui prendre, pas même une petite humaine inconsciente qui se fourrait dans les dangers toute seule de façon stupide ! Même lui ne s’attendait pas à ressentir une telle chose si intensément et essaya de se calmer, parce que oui il se sentait soudainement énerver. Jalousie… Colère… Luxure… Possessivité. S’il ne se calmait pas de tels sentiments négatifs allaient le ronger.

Rafiel était heureusement incliné, peut-être n’avait il rien vue de son expression ? A moins que le silence de plus de deux secondes parle pour lui. Haniel avait envie de fracasser son bureau en deux pour l’effet dramatique, lui dire un grand « non » et l’attacher sur une chaise pour lui montrer à quel point que non il n’irait nulle part parce qu’il était à lui. Comme cela ne se faisait pas et effrayerait surement son disciple plutôt qu’autre chose, Haniel se contenta de respirer un grand coup, tâcha de rétablir un air affable sur sa figure et répondit du ton le plus serein qu’il lui était possible de donner à cet instant :

- Es-tu sûr que cela ne te fera pas trop de travail en plus de ta mission initiale ? Tu sembles l’apprécier mais peut être pourrait on en toucher deux mots à un ange gardien n’ayant pas encore d'humain.


La belle tentative d’esquive. Le Grand Archange savait que si Rafiel insistait il le lui accorderait parce qu’il ne voulait pas le rendre triste ou que son disciple ne lui en veuille. Haniel respirait plus profondément que d’habitude silencieusement, gardant son attitude détendu, les bras croisé sur son haut noir et ample cachant mal sa musculation. Cette force qu’il peinait à contenir de plus en plus.

Haniel écouta donc les arguments de Rafiel, qui étaient logiques. Oui bien sûr, tout cela se tenait et cela serait plus facile pour un ange gardien de veiller sur l’humain ci celui-ci – ou plutôt celle – venait le voir d’elle-même en toute confiance. Mais émotions et logiques ne concordait pas toujours, l’Archange ne le savait que trop bien, et ses sentiments capricieux ne semblaient pas disposer à écouter la voix de la raison. Rafiel préférait s’occuper de la-dite Joah de lui-même. Etait-elle si importante que cela à ses yeux pour ne pas se faire surveiller par quelqu’un d’autre ? Oui Rafiel avait bien dit qu’elle le connaissait déjà mais Haniel songea qu’un autre ange gardien n’avait qu’à se faire lui aussi passer pour un humain pour être son ami. Diantre s’était n’importe quoi, est ce qu’il était vraiment en train de penser à contrecarrer les projets de son disciple ? Il se trouva odieux. Rafiel venait ici en lui faisant confiance et voilà que tout ce qu’il trouvait à faire était de vouloir dire « non » ?

Et puis d’abord, pourquoi est-ce que son élève s’inclinait ? Haniel en avait ras le bol du protocole – surtout énervé comme maintenant – et se disait que tout de même, Rafiel avait juste besoin de lui demander poliment s’il voulait quelque chose, sans forcément faire… Faire comme il faisait d’habitude.

« Cela dit… vous me paraissez un peu.. hum…. Comment dire… fâché peut-être ? Un iota énervé ? Aurais-je dis quelque chose qui vous aurait offensé… ? »

Ca par exemple. C’était d’une frustration intolérable. Cette petite phrase pleine de précaution était insupportable à ses oreilles. C’était mignon dans la bouche d’un nouveau venu mais exaspérant alors qu’il connaissait son interlocuteur depuis des siècles. Lentement il décroisa les bras afin de s’adosser plus confortablement en regardant son interlocuteur pour lâcher :

- Juste un peu contrarié que tu te sentes le besoin de t’incliner devant moi. Tu sais que je suis prêt à te rendre service en toutes circonstances.

Et accessoirement terriblement jaloux que Rafiel trouve une femme sympathique. Qui sait ce qui en découlerait ? Et si… ? Non, il ne valait mieux pas y penser. Surtout pas. Il devait donner son accord, il le savait mais les mots refusaient de sortir de sa bouche. Avec difficulté mais tâchant de rester impassible il ajouta le plus naturellement possible :

- Mais sinon, j’accepte.

Voilà, c’était dit. Le plus dur était fait il n’aurait plus qu’à officialiser cela. Rafiel était assez âgé pour savoir si c’était à sa porter ou pas et Haniel le savait fiable, cela serait idiot de ne pas lui accorder ce souhait surtout sous prétexte qu’il était jaloux et qu’il avait peur de le perdre. Ce ne serait pas digne d’un ange responsable et mâture, n’est-ce pas ? Un Grand Archange ne devait pas laisser ses sentiments personnels interférer surtout pour des futilités. Malgré qu’il garde la tête haute, l’expression d’Haniel restait étrange, son sourire avait disparu, preuve que la façade de nonchalance avait fini par se craqueler, même s’il essayait de rester impassible pour ne pas faire peur à son disciple.

Haniel se demanda s’il n’y avait pas été un peu fort mais il n’était pas d’humeur très diplomate aujourd’hui. Toute cette incompréhension vis-à-vis du comportement de Rafiel accumulé avait fini par ressurgir. Il ne le comprenait pas. Est-ce qu’il l’avait mis mal à l’aise ? Voilà ce qui lui en coutait d’être trop franc… Avait-il fait peur à son disciple ? Celui-ci s’excusait en tout cas… Baissant les yeux. Pourquoi ? Il craignait de le regarder ? Ou surement sa légendaire politesse…

« Quelque chose ne va pas… ? Vous pouvez me parler vous savez…. »

Devait-il commencer depuis le début ? Ou juste la fin ? Haniel s’approcha de son élève et déclara :

- Je suis juste un peu mal à l’aise avec trop de…

De manières ? Surement. C’était un peu tard pour lui dire ceci dit. Haniel soupira doucement.

- Est-ce que je t’ai fais peur ? D’habitude je fais plus attention à ne pas m’énerver.

En même temps, qu’est ce qu’il prenait à Rafiel de lui demander un truc pareil ?! Allons bon, ce n’était pas de sa faute ceci dit si l’Archange était devenu jaloux d’un coup. Son disciple ne faisait que son devoir, il n’y avait aucune raison de devenir aussi agressif envers lui.

- Je ne voulais pas t’effrayer…

Et lui montrer sa colère. Le coté tempétueux de sa personnalité. Haniel recula ensuite, ne sachant que faire. Il savait que Rafiel était la personne la plus proche de lui à ce jour mais il ne savait pas s’il était vraiment… du moins s’il pouvait être considéré comme un confident. Est-ce qu’on pouvait avoir des pensées perverses envers son confident et être jaloux si celui-ci demandait à être l’ange gardien d’un humain spécifique ? Est-ce qu’il serait choqué d’apprendre sa relation jadis avec un démon ? Mais surtout, un ami ne devait-il pas se voir comme un égal ? C’était surement là ce qui gênait depuis si longtemps l’homme aux cheveux blonds. Il pensait que Rafiel se considérait en dessous de lui à cause de sa manière d’agir et de parler mais lui voulait quelqu’un pouvant se mettre sur un pied d’égalité avec lui. Non pas au niveau de la force – s’il voulait faire ça autant aller voir par exemple Camael mais il était sûr que dès qu’il passerait sur le chapitre « démon » niveau amitié ça n’allait pas le faire – mais au niveau du comportement. Bon, peut-être pas en public forcément – personnellement ça ne le gênerait pas tant que ça – mais qu’au moins en privé Rafiel ne se sente pas obligé d’être… timide. Rha il ne savait pas trop comment dire.

Haniel détourna le regard à son tour et pour une fois, perdait un peu en assurance. Il n’avait aucune idée de comment expliquer cela à son disciple, surtout après autant de temps et peut être que ce n’était pas une bonne idée…

Haniel était un peu rassuré, au moins ne lui avait-il pas fait peur : il ne manquerait plus que ça ! D’un côté le fait que Rafiel se déçoive en pensant l’avoir contrarié était un concept plutôt étrange…Il ne fallait non plus qu’il se mette dans cet état ! Enfin, c’était peut-être surement comme lui quand il avait réalisé qu’il était en train d’être jaloux et voulait contrecarrer les plans de son disciple. Bon soit, il comprenait un peu le principe. Alors la situation était réglée ? Peut-être pas… Finalement.

« Cela dis je suis plutôt perplexe… Vous me dites que … ma politesse si j'ai bien compris vous rend mal à l'aise… Vous ne m'en aviez jamais parlé… ou bien… Etait-ce juste aujourd'hui ? »

Comment allait il expliquer cela ? L’Archange était surpris de la question, redressant les yeux. Est-ce qu’il se lançait ou attendait un autre millénaire sans rien dire ? Cela ne serait pas très sain, Haniel avait déjà mis plusieurs fois ses plumes en danger de grisaille, ce n’était peut-être pas le moment de rajouter de potentielles tâches. Déjà qu’un vague sentiment de jalousie résistait encore à son calme forcé… Et puis Rafiel avait le droit de savoir tout de même. Du moins si jamais il n’était pas trop tard… Haniel s’assit de nouveau contre le rebord de la table pour déclarer :

- Je ne savais pas comment te le dire en fait… Ce n’est pas vraiment la politesse mais…

L’Archange fronça un peu les sourcils, concentré, essayant de transformer maladroitement son ressentit en parole. Il déclara :

- J’aurais préféré que nous soyons plus… Amis. Du moins que… Nous soyons plus proches. Enfin.. C’est paradoxale je sais que nous sommes proche parce que… Je me sens jaloux de savoir que tu vas être ange gardien…

Il s’égarait là.

- Bref, que nous soyons sur un pied d’égalité au niveau du comportement. Voilà, c’est surement idiot mais j’ai envie de parler avec toi comme à un… égal.

Haniel avait du mal à expliquer ses émotions. Il essayait des synonymes :

- Que nous soyons… Plus intime.

Enfin Haniel avait vraiment une notion d’intimité vraiment… très intime. Quand il disait cela, il fallait plus envisager la notion d’amant que d’ami. Après tout, il n’était pas jaloux quand ses connaissances faisaient leur travail d’ange gardien.

Rafiel tentait d'écouter Haniel. Il voulait savoir pourquoi il l'avait mis mal à l'aise et ce qu'il avait fait pour ne plus jamais le remettre dans un état pareil. Il était assis sur la chaise, crispé, les bras ramenés vers lui, tendu, inquiet, observant l'attitude d'Haniel. Il lui avouait qu'il ne savait pas comment lui dire… Si ce n'était pas la politesse alors qu'est-ce que c'était donc ?

« J'aurai préféré que nous soyons plus amis… » cette phrase fit tilt dans sa tête… Pardon… ? Deux minutes, deux minutes, réfléchir… Il était tellement concentré dessus qu'iil ne fit qu'à peine attention à la suite de celle-ci… Mais n'étaient-ils pas proches ? N'étaient ils pas amis ? Il s'était toujours confié à Haniel, et lui aussi en faisait parfois de même -bien que vraisemblablement moins-.

«  Attendez, attendez…  »

L'on pouvait voir que cette phrase l'avait choqué. Il s'était même levé. Il ne savait pas d'ailleurs comment il avait fait vu que ses jambes ne le tenaient qu'à peine, il ne les sentait même plus. Il pensait à tout ce qu'ils avaient vécus avec Haniel, la première rencontre. Doucement, il se rendait compte de l'implication des paroles d'Haniel. C'était dur, très dur envers Christopher. S'ils n'étaient pas amis tous les deux, ou pire, si la relation n'allait que dans un sens… Haniel n'avait… Personne ? Il avait qu'il était la personne la plus proche de lui et… cette personne la plus proche n'était pas considérée, de sa part, comme étant un ami… Alors comment faisait-il… ?

«  Vous avez du tellement souffrir………..  »

Il n'en pouvait plus. Ses jambes le lâchèrent, il tombait ainsi devant le bureau. Avait-il juste été totalement stupide pendant touts ces années… Il n'avait rien vu, rien de rien ! Rapidement des larmes vinrent rejoindre ses joues pour s'écraser sur le sol. En pleurant, il fini par lâcher.

«  Au début notre relation était.. certes… assez… professionnelle ? Mais vous êtes un ami… Je me suis confié à vous, je vous ai parlé de mes doutes et de mes angoisses, vous avez été présent pour moi… j'ai pensé l'être pour vous aussi…. Je suis désolé… désolé… Mon dieu je ne vous mérite pas je suis désolé….  »

Sa main vint se poser sur sa croix, il se sentait tellement un mauvais compagnon là… Il enlevait sa croix – c'était un grand geste pour lui-, Il n'arriva cependant pas à la poser sur le sol, elle était trop importante pour y finir… Rafiel était triste, certes, mais il pleurait surtout pour Haniel, parce qu'il avait tellement du…. Être mal ce miillénaire ? Il se demandait vraiment comment il avait fait pour supporter cette relation qu'il n'avait pas réussi à lui faire comprendre. Il n'osa rien ajouter.

Haniel regardait la scène avec incompréhension… Visiblement il avait dit une grosse bêtise. Aurait-il dû se taire et ne pas lui dire qu’il aurait voulu être encore plus ami avec lui ? Oh non, Rafiel était tombé ! Et il pleurait… L’Archange se sentait monstrueux de faire souffrir ainsi son disciple, il ne s’était pas attendu à cela.  

« Au début notre relation était.. certes… assez… professionnelle ? Mais vous êtes un ami… Je me suis confié à vous, je vous ai parlé de mes doutes et de mes angoisses, vous avez été présent pour moi… j'ai pensé l'être pour vous aussi…. Je suis désolé… désolé… Mon dieu je ne vous mérite pas je suis désolé….  »

Est-ce qu’il enlevait sa croix ? Haniel en était même choqué de le voir faire un tel geste. Ne pas le mériter ? Qu’est-ce que son disciple racontait comme non-sens ? C’était lui qui le mettait dans cet état, le fautif dans l’affaire était bien l’Archange et non pas son disciple. Le blond se sentait désemparé face à la détresse de Rafiel, cela lui faisait mal aussi de le voir si malheureux. Il s’approcha de lui et s’agenouilla prestement à ses côtés, prenant sa main tenant sa croix dans les siennes. Son regard bleu fixa avec inquiétude son disciple pour finalement déclarer :

- C’est moi qui ne te mérite pas… Je…

Il soupira, serrant ses mains un peu plus fort, sans lui faire de mal.

- Je pensais que… tu serais déçu d’apprendre que…

Il baissa d’un ton.

- J’ai eu une relation avec un démon, et j’ai mentit pour le protéger.

Ce n’était pas spécialement le moment pour sortir de telles choses mais si il voulait être enfin honnête, autant se libérer de se secret. En tant qu’ancien prêtre, Rafiel avait le droit de savoir qui il avait réellement comme nom sur sa croix. Sa voix se perdit en un chuchotement.

- Je ne suis pas un bon ange…

Haniel le regarda avec hésitation, sa voix se brisa un peu mais il continua sur sa lancée :

- Et mes ailes ne sont pas totalement blanches… Parfois j’y pense encore… Pourtant c’est vieux. Peut-être que des humains sont morts à cause de ça… Mais je n’aurais pas pu le tuer. Je le déteste de s’être joué de moi, d’être partit sans un au revoir, parce que… c’était aussi mon ami.

Il ricana, sarcastique :

- Ou un peu plus à ce stade.

Enfin, Haniel s’égarait. Il passa une main sur la joue de son disciple pour tenter de sécher ses pleurs :

- Je n’ai pas d’excuse pour te l’avoir caché… Tu as le droit de m’en vouloir et de me détester, je resterais toujours ton protecteur quoiqu’il advienne.

Voilà, c’était dit. Il regarda Rafiel avec inquiétude. Si son disciple le rejetait, il ne savait pas ce qu’il allait devenir. Il se promit d’être plus sincère à l’avenir avec lui, s’il voulait bien le supporter après son erreur.

Haniel se sentait coupable de mettre son pauvre disciple dans un tel état de détresse. Le voir ainsi pleurer le renvoyait à l’écho de sa propre souffrance, de son incompréhension qu’il avait caché des siècles durant. Alors Rafiel pensait ne le détestait pas malgré cela ? Rafiel ne l’aurait même pas détesté… Quel idiot il était ! L’Archange se sentait bête et désemparé à cause d’une telle méprise. Face à son erreur, Haniel comprenait enfin à quel point il s’était comporté de façon stupide. Cette croix qu’il avait toujours eu du mal à accepter, il avait cru se sentir mieux si Rafiel l’enlevait, mais il n’en était rien. Le voir dans de telles circonstances la décrocher de son cou lui faisait étrange après toutes ces années. Cela lui faisait surtout mal alors il gardait sa main dans la sienne pour empêcher la croix de tomber.

« Je suis tellement désolé de ne pas avoir vu votre souffrance… »

Haniel arrêta de lui caresser la joue pour venir complètement passer un bras autour de ses épaules afin de le garder prêt de lui, essayant de le protéger même si c’était lui qui avait ainsi blessé son disciple. Il ne savait pas quoi dire pour réparer ses erreurs, même si une erreur aussi grosse était surement impardonnable, pourtant…

« …. ….. ….. Je veux être votre ami….. ……. S'il vous plaît……….. S'il vous plaît………… »

Pourtant Rafiel souhaitait être son ami. Rester son ami parce qu’Haniel réalisait que celui-ci l’avait toujours été et que c’était lui qui n’avait simplement pas su le voir. Il le serra un peu plus dans ses bras, sentant les émotions l’envahir. Les larmes lui montèrent aux yeux, fissurant le masque qu’il avait forgé après tout ce temps. Pour une fois, il n’allait pas les cacher, ce serait contre l’honnêteté qu’il essayait d’établir avec son disciple. Surtout dans son cas en fait, puisque Rafiel avait toujours été franc avec lui, même avec sa façon de le vouvoyer. Il enfouit son nez dans ses cheveux pudiquement, pour ne pas que ses larmes ne soient trop visibles et lui répondit, caressant ses cheveux :

- Oui, bien sûr que oui Rafiel.

Haniel respira son odeur rassurante, se calmant progressivement. Reprenant un peu plus de sang-froid, il déclara chaudement :

- Si tu veux, tu peux garder ta croix, je serais triste si tu l’enlèves.

Fait étrange depuis le temps qu’il regardait celle-ci de travers, mais à présent, cela faisait sens. Il essaya ensuite de les redresser tous les deux, soutenant son disciple pour éviter qu’il ne s’écroule au sol, se faisant doux et plus fragile Haniel lui dit :

- Pardonnes moi Rafiel, je suis un idiot.

L’Archange ne trouvait pas d’autre mot pour désigner sa confusion, son erreur. A présent il se jura se faire pardonner en étant plus franc avec son ami – celui qu’il avait mis tant de temps pour le voir – sans se montrer trop cachottier sur ses émotions quand bien même elles seraient négatives.

- Je suis vraiment chanceux d’avoir quelqu’un comme toi comme ami.

C’était le moins qu’il puisse dire, son disciple le comprenait donc et ne le jugeait pas pour son écart, n’est-ce pas ? A partir de là il pouvait surement tout lui confier, le plus « choquant » pour un ange étant passé.