Ciel a l'âme d'un négociant, comme tout bon dirigeant d'une entreprise. Non seulement il sait marchander, mais il possède également un charisme incroyable pour un garçon de son âge et n'hésite pas à s'imposer. Cela constitue également son plus grand défaut car il ne sait pas être humble et n'apprécie pas que l'on le dénigre, ripostant toujours verbalement à ses adversaires sans pour autant s'énerver. D'une sévérité peu commune, il rabaisse parfois ses opposants d'un simple regard... Mais en un regard qui en dit long sur ce qu'il pense. S'attirant parfois pas mal d'ennuis de par son caractère difficilement supportable, il garde toujours sur lui un revolver de grande qualité ainsi qu'une épée dissimulée dans sa canne. Il est du genre têtu, très têtu, et lorsqu'il a un but en tête il n'hésite pas à tout sacrifier pour l'atteindre, même par des moyens détournés - ou illégaux. Il ne croit pas en la justice dans ce monde et, au lieu de chercher à survivre dans la cruauté humaine, il essaye au contraire de s'imposer aux autres. D'être un "gagnant", le "roi", et non pas le "perdant", ou un simple "pion" dans un jeu d'échec. Il serait capable de tuer pour cela... Ou de donner sa propre vie.

Du haut de sa petite taille, malgré sa silhouette élancée et son regard perçant, on ne peut pas dire que Ciel Phantomhive est le genre de personne à qui l'on s'attend lorsque l'on entend parler du dirigeant de la société Phantom. Ses cheveux, doux comme la soie, sont d'un gris soutenu. Certaines rumeurs prétendent qu'ils seraient passés du noir de jais au gris cendre lors de l'incendie qui coûta la vie à ses deux parents, changement de couleur dû à la poussière et aux saletés qui se seraient mêlées à sa chevelure pour ne plus en sortir. Sa peau est claire, presque pâle, et reste aussi douce qu'une peau d'enfant tandis que son bandeau noir, qui masque son oeil droit, reste une marque d'un passé certainement trés difficile. Sa pupille gauche,est vif et acéré,et est d'un bleu royal et garde souvent un air hautain, et noble. Si son corps et son visage ainsi que ses vêtements de très bonne facture lui donnent l'impression d'être une poupée de porcelaine, son unique oeil visible prouve à lui seul que l'enfant n'en est déjà plus un. Ou du moins, qu'il est très précoce pour un enfant d un tel âge.

Contrairement à ce que disent certaines rumeurs mal placées, Ciel n'a pas toujours possédé le caractère froid et sévère qu'il a actuellement. En réalité, jusqu'à ses dix ans, il fut un enfant joyeux et insouciant. Il passa une enfance relativement heureuse.

Fils unique d'une riche famille anglaise, les Phantomhive, il était extrêmement choyé et souriait sans cesse, profitant pleinement de sa vie tout en s'apprêtant à succéder à son père, le noble comte Phantomhive. Ce dernier dirigeait déjà l'entreprise que Ciel possède actuellement, société déjà bien implantée dans quelques pays européens, et ayant largement assez de fond pour parfaire l'éducation de son fils, le comte enseigna à son fils - à travers de nombreux professeurs particuliers - l'art de l'épée, de la musique et de la danse. Ce dernier se révéla d'ailleurs incompétent dans cette dernière matière, tandis qu'il se distingua en musique de par sa voix douce et claire. Ses sept premières années s'écoulèrent ainsi. Le jour de ses huit ans, sa mère lui présenta sa future fiancée, la jeune duchesse de Middleford, une de ses lointaines cousines tout aussi âgée que lui. La jeune fille, aux longs cheveux blonds bouclés, répondait au nom d'Elizabeth. Tous les deux, emplis d'une joie de vivre et d'une sympathie naturelle, s'entendirent à merveille et, bien trop jeunes pour ressentir de l'amour, ils devinrent des amis inséparables.

Deux années supplémentaires s'écoulèrent sans encombre, malgré la découverte de l'asthme de Ciel. Ayant toujours été un enfant de santé fragile, ses proches prirent d'autant plus soin de lui et il recouvra bientôt un état jugé "normal".
Les fêtes de fin d'année s'approchaient et déjà, l'ambiance était à la fête, lorsque Elizabeth invita par surprise Ciel à se rendre chez elle pour un goûter. Acceptant avec plaisir, néanmoins un peu réticent quant à devoir quitter ses chers parents, le jeune garçon se rendit donc chez sa petite fiancée.

Lorsqu'il revint, le manoir familial venait de prendre feu.

Emporté par la panique, la peur et l'angoisse, le jeune garçon se précipita sans réfléchir à l'intérieur de sa demeure, sous les cris horrifiés d'Elizabeth. Parcourant à toute vitesse les pièces luxueuses du manoir, qui sombraient peu à peu dans les flammes aux reflets sanglants, Ciel cherchaient désespérément ses parents. Au détour d'un couloir, il croisa un de ses vieux domestiques qui lui hurla de fuir mais, avant d'avoir pu terminer sa phrase, un coup de feu retentit et le vieil homme s'écroula sous les yeux innocents de l'enfant. Aussi choqué qu'il était, Ciel réussit à s'empêcher de crier afin de ne pas alerter les intrus qui venaient de pénétrer sa maison et il se faufila jusqu'au bureau de son père, le cœur aux bords des lèvres et les larmes aux yeux. Si seulement il s'était préparé à voir ce qu'il vit finalement...

Avachi sur sa chaise, tournant le dos à la porte, le comte Phantomhive siégeait au milieu des flammes. Un soulagement sans borne s'empara du coeur de l'enfant, qui se rapprocha de son père tout en l'appelant. Pourtant, lorsqu'il aperçut le visage familier, un sursaut d'horreur et de souffrance secoua son corps. Les yeux de l'homme étaient vitreux, grands ouverts, comme s'il voyait quelque chose que personne d'autre ne pouvait voir, et un rictus d'ironie tordait ses traits fins d'aristocrate. Sur son torse et au niveau de ses côtes, à travers ses habits de haute facture, s'écoulaient d'énormes tâches de sang. Il était déjà mort... Et pourtant, son corps était encore tiède.
Un long hurlement retentit dans tout manoir de la famille Phantomhive.

Les intrus ne tardèrent pas à découvrir Ciel, qui avait déjà cessé toute lutte et, au lieu de le tuer, ils décidèrent de l'emporter avec eux. L'enfant ne savait pas pourquoi. En réalité, il ne voulait plus rien savoir. Attaché, les yeux bandés, après avoir reçu quelques coups auxquels il n'avait pas réagit, il apprit les affaires "souterraines" de son père, qui n'était pas simplement le dirigeant de la société Phantom. Il semblait avoir négocié de nombreuses fois avec des personnes peu recommandables, mais cela importait désormais peu à Ciel... Pourtant, une seconde information parvint à ses oreilles : Il apprit la mort de sa mère. L'un des intrus l'avait apparemment violé avant de l'avoir tué et s'en vantait avec délectation, ce qui réveilla enfin l'esprit perdu du jeune garçon. Il se mit à hurler, à bouger dans tous les sens, cherchant à se libérer de ses liens tout en tentant de faire mal à un ennemi qu'il ne voyait pas. On ne tarda pas à l'immobiliser entièrement et, après lui avoir injecté plusieurs produits, il sombra dans les ténèbres.

Il ne se réveilla que par alternance, se souvenant juste du frottement des chaines contre ses poignets et ses chevilles, la froideur des lieux, l'odeur permanente du sang, la douleur quand on lui imprima un tatouage sur la hanche, les autres enfants enfermés avec lui qui disparaissaient chacun leur tour pour ne plus revenir et leurs cris déchirants qui retentissaient contre les parois des murs glacés lorsqu'ils étaient écartelés, égorgés, éventrés. Lui qui croyait à Dieu ne cessait de prier pour que quelqu'un, n'importe qui, puisse le sauver de cet Enfer. Pourtant, les jours passèrent, et personne ne vint. Alors, quand vint son tour d'être sacrifié sur l'autel, allongé sur le marbre glacé, sentant le sang séché contre son dos nu et les regards insistants - presque avides - des adorateurs de démon sur lui-même, simple petite brebis à éventrer pour attirer le grand loup, il ne songea plus qu'à une seule chose.

Tuer... Tuer. Les tuer tous, sans exception. Tel était son souhait.

On ne sut comment il sortit vivant de ce lieu sombre et terrifiant, mais il en sortit. Meurtri jusqu'à l'âme, certes, et mutilé à vie, mais il était vivant et c'était ce qui comptait le plus pour lui. Il ne chercha pas à se dissimuler pour vivre une vie tranquille et humble, mais retourna au manoir familial, réduit à l'état de cendre. Ce fut ici qu'il récupéra la vieille bague de son père, qui la portait autrefois à son pouce gauche. N'ayant plus qu'une solution en tête, il marcha jour et nuit pour atteindre la demeure d'Elizabeth qui lui accorda de suite l'hospitalité, après avoir pleuré sur son épaule durant au moins une demi-journée. Deux années s'écoulèrent ainsi, deux années où il se déclara sans une once d'hésitation héritier des Phantomhive et reçut sans chercher à fuir le titre qui devait lui appartenir. Il ne semblait pas craindre les représailles, ni même les ennemis de son père. De plus, si l'on regardait au delà du petit garçon chétif que laissait transparaître son image, on pouvait clairement voir la détermination qui brillait dans son unique oeil bleu. Pourtant, son sourire jovial avait disparu à tout jamais dans les tréfonds des flammes, perdu au milieu des souvenirs heureux et insouciants de son enfance... Seul subsistait la douleur dans son regard.