Excusez-moi ? C'est MON âme !

Alors que je n’avais pas rendu mon précédent rapport, le supérieur me remit un nouveau dossier sur les bras. Super ! Je n’avais pas encore commencé à remplir l’ancien, quand est-ce que j’allais rendre celui-ci ?! Il ne pouvait pas le donner à quelqu’un d’autre, son travail supplémentaire !
En sortant du bureau de mon supérieur, un soupire s’échappa d’entre mes lèvres. Je me dirigeais ensuite vers mon logement, situé à l’étage au dessus. En ouvrant la porte de ma chambre, je fis valser le dossier, encore vierge sur mon lit et me jetais à mon tour dessus, en lançant un « Putain ! » de mécontentement. Ce travail, il n’allait pas se faire tout seul, et si je ne commençais pas dès à présent, j’allais me faire taper sur les doigts. Pourtant, à cet instant, je n’avais qu’une seule envie : Me prendre un bon café en fumant une clope.
Me levant avec peine de mon lit, qui m’appelait pour que je me recouche et m’endorme, sans avoir touché au rapport, je me dirigeais vers la fenêtre de ma chambre et posais mon regard vers le ciel. Il faisait beau, un temps idéal pour travailler… La bonne blague. Je soupirais de nouveau, tapant du pied, attendant que mon esprit se décide à savoir ce que je voulais vraiment faire. La réponse était évidente, pourtant : Je voulais tout simplement passer mon après-midi dans un café, une clope au bec, à attendre que les heures passe en regardant les gens passer. C’est ce que j’allais faire, justement !

Direction le monde des Humains.

J’atterris majestueusement sur le toit d’une maison, et regardais aux alentours de celle-ci, cherchant du regard un café où je pourrais passer mon après-midi. Bingo ! Après quelques secondes de recherche, mes yeux se posèrent sur un petit café tranquille, à l’allure plutôt élégante et qui semblait paisible. Je sautais du toit pour atterrir sur les pavés, puis me rendit dans l’endroit convoité. Là-bas, je m’installais en terrasse, à l’abri du vent et des regards, et attendait que quelqu’un vienne à moi, assouvir mon envie de café. Lorsque le serveur arriva pour prendre ma commende, je lui indiquais ce que je souhaitais, et il revint quelques minutes plus tard, la boisson chaude, présentée sur un grand plateau doré. Mes yeux se mirent à pétiller et un sourire se dessina sur mes lèvres. Oui, j’étais en manque de café.
Je savourais ma boisson, et décidais de jeter un rapide coup d’œil à mon dossier. De toute façon, il fallait que je le commence ce jour là.
Sur la première page, le visage d’un jeune garçon était imprimé, avec à côté, une biographie qui indiquait un homme en études de droit. La question que je me posais alors : Est-ce qu’il mériterait d’être épargné ?
Non pas parce que j’avais de la pitié, mais plutôt parce que ça m’arrangeait, voyez-vous. Et puis, peut être ce garçon allait changer la face du monde ! Qui sait.

Après avoir fini mon café, et allumé une clope que je plaçais entre mes doigts, je me levais et déposais un billet sur le plateau du serveur.

« Gardez la monnaie. »

Vous ne trouvez pas que ça fait trop classe de dire ça ? Ca te donne l’air puissant, comme si t’étais tellement riche que tu pouvais donner un pourboire dans tous les cafés et restaurants où tu allais !
Après avoir tiré une bouffée de nicotine, je me rendais dans le quartier Est de Londres, où m’attendait mon éventuelle victime. « Eventuelle », car peut être ne méritait-elle pas totalement de mourir… Au quel cas, je me devais de l’épargner, et retourner boire un café pour fêter ça. Mais n’avançons pas trop dans le temps, mon homme m’attendait !
Sautant avec agilité de toits en toits, jusqu’à arriver dans une sombre ruelle où je posais les pieds à terre, je sentais à présent une aura puissante… Ca puait, en fait. Ca puait le danger, et ça puait les rues bien pourrit, le quartier moisie et les gens dangereux. Je m’armais de ma faux, et avançais prudemment, jusqu’à ce qu’un corps, sans vie,  nageant dans une marre de sang, attira mon regard. A côté de ce corps gisant au sol, un homme se tenait debout, le dos droit et semblait regarder vers moi.
Je regardais de nouveau vers la victime, qui…

« OH MAIS.. ! »

C’était l’homme que je recherchais. Grimaçant, et posant mon regard sur l’homme à côté du corps, la soupirais un :

«  Et bien… On dirait que j’arrive trop tard. »

Excusez-moi ? C'est MON âme !

« Oh, chiale pas pour cet humain. C'est leur sort; naître, vieillir, mourir. C'est pas comme s'ils allaient s'en sortirent vivant de toute façon! »
 
Ah super, et je dis quoi à mon patron moi ? Hein, j’te l’demande ! Quelle plaie. Un soupire, de nouveau, s’échappa d’entre mes dents, tandis que je laissai la lame de ma faux heurter le sol, tandis que je tenais toujours fermement l’autre bout.
 
« Qui es-tu, morveux ? »
 
Un corps, sans vie, avec un homme à côté. Un corps sans âme, avec… Ouais, ça ne pouvait être qu’un démon. Les yeux rouges, l’aura puante… Ouais, j’avais vu juste. Bon, je lui répondais quoi, maintenant ? T’façon, avec ma faux qui trainait derrière moi, et mon sang froid face au corps gisant au sol, c’était cramé que je n’étais pas humain. Bah en  même temps, ce n’est pas comme si j’essayais de cacher mon existence au monde, mais ça c’est autre chose. Et si je devais prendre la fuite ? Un démon, il me voulait surement du mal ? Ou alors il n’en avait rien à cirer de moi, je le dérangeais juste ? Ah bah, excusez-moi, je fais mon boulot ! Pour une fois que j’essayais de bien faire… Ah, merde quoi.
 
« Moi ? Euh… Bah… »
 
Bah…
 
« Bah… J’étais à la poursuite de cette chose, figurez-vous ! »
 
Je pointais ensuite du doigt le corps au sol. J’étais vraiment pas crédible là. Ca faisait limite pièce théâtrale, j’avais l’air d’un vrai rigolo.
 
« Mais maintenant que son âme est dans votre estomac, je fais quoi moi ?! »
 
La ruelle était si sombre que je ne pouvais voir du démon uniquement ses yeux rouge sang. Par contre, le truc tout dégueu à côté, je le voyais parfaitement hein ! Berk. Je n’osais pas vraiment bouger. Ni m’avancer vers le voleur, ni m’enfuir en courant comme un abruti. C’était probablement ce que je devais faire, mais j’avais peur qu’il me rattrape et m’égorge vif. Bah, j’aurais eu une belle vie, mais ça m’aurait bien saoulé de mourir de cette façon. Oh et puis, il se pouvait également que le démon ne me veuille aucun mal. Ca pouvait être … Une sorte de Ramiël n°2 ?
 
Bon, et sinon, pour mon rapport, je faisais comment ? Tout le monde allait se foutre de moi si je leur disais qu’un démon était arrivé avant moi. Bon, c’est pas comme si ce serait la première fois que je me tapais la honte devant toute la Dispatch, mais voilà quoi. Si je devais perdre mon temps… Autant le perdre d’une façon plus amusante que de se faire engueuler par le grand patron qui nous rappel à quel point on est nul. Ah j’vous jure, des fois le métier…